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Un poisson pour nourrir le monde
Une grosse morue
Un poisson pour nourrir le monde
11 juin 2021

La morue est au cœur de l’histoire du monde occidental. Les Vikings en effectuaient déjà le commerce il y a près de 1000 ans. Dans les pays catholiques, les fidèles se voyaient interdire la consommation de viande durant plus de la moitié de l’année. Durant ces jours dit “maigres”, ils se tournaient donc vers le poisson… ce qui en faisait un commerce très lucratif.

Parmi les différentes espèces, la morue est particulièrement intéressante au plan alimentaire: abondante, savoureuse, protéinée et surtout facile à conserver. Les Vikings avaient développé une technique de séchage permettant d’assurer sa conservation pendant des mois, voire des années, ce qui permettait de la transporter partout à travers l’Europe.

Pour pêcher la morue, les Vikings iront jusqu’à traverser l’océan Atlantique et à coloniser le golfe du Saint-Laurent. Il faut cependant attendre cinq autres siècles pour voir débarquer en masse les pêcheurs européens: Français, Britanniques, Basques, Portugais et Espagnols. Dans la foulée des grandes découvertes, l’Europe est en pleine expansion et recherche de nouvelles ressources à exploiter.

Les premiers explorateurs ne tarissent pas d’éloges sur l’abondance de morue dans le golfe du Saint-Laurent. Avec l’arrivée de Jacques Cartier (1534), c’est la France qui s’accapare des principales zones de pêche… pour l’instant du moins. Car la Grande-Bretagne est aussi intéressée par ce lucratif commerce. Rapidement, le conflit éclate. Au terme de la guerre de la Conquête (1760), les Britanniques mettent la main sur la quasi totalité des pêcheries du golfe.

En pleine révolution industrielle, la Grande-Bretagne est à la tête d’un immense empire commercial. Ce rattachement donne un véritable coup de fouet à l’industrie des pêches. En Gaspésie, ce sont les entrepreneurs de l’île de Jersey qui se démarquent. Et, en 1766, le jersiais Charles Robin s’installe à Paspébiac pour fonder ce qui deviendra la plus importante compagnie de pêche de l’Est du Canada.

Rapidement, l’entreprise exporte des quantités phénoménales de morue sur les marchés de l’Italie, de l’Espagne, du Portugal, des Antilles et du Brésil. De ces pays, elle rapporte des produits qu’elle revend partout en Europe et en Amérique. Le banc de pêche de Paspébiac devient le cœur d’un commerce d’envergure internationale fondé sur la collecte, la transformation et l’expédition de la morue séchée gaspésienne (la fameuse “Gaspé cured”).

La compagnie Robin poursuivra ses activités pendant plus de 250 ans, ce qui en fait l’une des plus ancienne et durable de toute l’histoire du Canada. Ici, à Paspébiac, vous aurez non seulement la chance de découvrir un pan méconnu de l’histoire, mais aussi l’un des plus ancien site industriel et patrimonial du monde atlantique.

 

Jeannot Bourdages, conservateur